Vous connaissez Peut-être de Joann Sfar
Délirant, intelligent, sarcastique, le livre de Joann Sfar «Vous connaissez peut-être » nous entraine dans une histoire complètement folle et loufoque qui lui est arrivée.
Une histoire ne servant que de toile de fond pour permettre au lecteur de retrouver l’écrivain prolifique qu’il est, avec ses peurs, ses désespoirs, ses joies et ses folies .
Un écrivain tellement humain qui ne cesse de remettre le monde en question, le monde virtuel avec « ses écrans plats toujours plus jolis et attirants. » Son djihad « cette guerre sacrée » est une guerre des idées, contre le mal qui est dans sa tête, et contre ce qui, selon lui, ne fonctionne pas dans le monde.
A travers ses délires les plus fous, au travers de cette écriture, l’auteur transforme ses peurs en histoires folles, et passe brillamment d’un sujet à l’autre.
J’ai été emportée par cette logorrhée qui m’a chamboulée et sidérée en même tant. Le livre de Joann Sfar n’est-il pas un énorme entonnoir dans lequel il vide toutes ses névroses?
Woody Allen et Joann Sfar, cousins ?
‘’ Tant que je n’aurai pas résolu le problème du chien et le mystère de la fille… ’’
Pour l’auteur, l’écran brille aujourd’hui plus que le monde et ce n’est qu’au travers de simples plaisirs comme cuisiner, loin de l’univers virtuel, que l’homme se sortira de ce monde perverti, pour se tourner vers un monde sans médiation.
C’est une histoire banale que nous conte l’ecrivain. Ca commence avec une photo sur Facebook et ça se termine au commissariat de police. Lily c’est son prénom. Ce qui intéresse l’auteur c’est son motif à elle et comment, lui, en est arrivé là.
Pourquoi s’attache-t-il à Lily alors qu’elle l’emmerde ?
Le réel l’ennuie-t-il tant, ou lui fait-il si peur, qu’il est incapable de faire face aux vraies rencontres?
Fait-il partie aujourd’hui de ce monde de cons fascinés par le virtuel qu’il critique tant. Cette histoire étrange avec Lily n’est qu’un simple déclencheur, « un trigger ».
A la période où il entre en contact avec Lily il désire acheter un chien et il compare sa recherche du chien parfait sur internet et sa rencontre avec Lily.
Marvin puisque c’est son nom, est arrivé au même moment que Lily.
C’est exactement comme sur Tinder ou Facebook. « Voir la photo d’un chien c’est se projeter dans l’amitié rêvée avec cette bête, c’est se raconter la relation idéale que devraient entretenir un chien et son maître et que ni l’un ni l’autre n’ont jamais éprouvée dans le vrai monde.
Cliquer sur le « vous connaissez peut-être » de Facebook lorsqu’il montre la photo de Lily, c’est se projeter dans une relation amoureuse que les vrais êtres ne peuvent pas s’offrir, tout simplement parce quelle n’a pas encore eu lieu et que c’est notre désir qui en comble les vides ».
L’histoire n’est qu’un prétexte pour parler des tourments de l’écrivain, de ses délires de ses observations sur le monde qui nous entoure, sur ce monde où tout n’est plus que virtuel, où on se cache derrière des images toutes faites, toutes construites.
Lui qui n’arrive pas à aimer, qui finalement ne s’attache qu’à une folle dingue qu’il n’a jamais vue.
Toutes ces conversations avec Elle, Elle dont le regard sur le monde est si brutal, si différent du sien, toutes ces conversations beaucoup plus attirantes que celles du vrai monde, le passionnent. L’écrivain n’est qu’une victime de plus de ce monde qu’il abhorre ! Son histoire amoureuse, sa petite histoire personnelle, tellement banale, n’est que le micro échantillon de la situation mondiale victime du virtuel.
Les générations qui arrivent n’auront plus le souvenir du monde sans cette « médiation déglinguée » qui nous poursuit jusque dans notre intimité.
Sa mésaventure avec Lily en est la preuve éclatante. Comme l’écrivain, tout le monde croit que ce qui est sur la toile est vrai.
Merci Joann Sfar pour votre livre qui m’a terrifiée et bien fait rire.